J'ai récemment eu l'occasion de visiter l'usine. Visite très intéressante qui permet de revenir sur l'impact environnemental de cette industrie sur notre ville et sur l'installation d'une filtration des fumées.
Fabrication du verre
La verrerie de Cognac fabrique des bouteilles, cette industrie est en partie née à Cognac avec l'invention par Claude Boucher de la première machine à souffler les bouteilles (brevet de 1894).
Le verre est fabriqué à partir de la Silice (sable), de quelques adjuvants (soude et calcaire principalement) et éventuellement de colorants. L'industrie verrière utilise de plus en plus une part importante de calcin (verre recyclé et broyé). Le mélange est très précis et dépend du type et de la qualité du verre fabriqué.
Le mélange de matières premières est fondu dans un four de fusion à 1600 °C puis injecté dans un premier moule qui donne une pré-forme. Un deuxième moule permet d'obtenir le forme définitive. La bouteille subit alors un traitement à chaud pour lui assurer sa solidité puis une recuisson. Après un refroidissement les bouteilles sont contrôlées puis emballées.
Fiche détailée sur la fabrication du verre
La verrerie Saint-Gobain est très automatisée, j'ai été surpris du peu de personnel sur les chaînes de fabrication. Avant ma visite j'avais un peu de mal à comprendre comment il pouvait être produit une moyenne de 2 millions de bouteilles par jour, mais à voir le débit des bouteilles sur les 2 chaînes et le niveau d'automatisation c'est assez impressionnant.
Le cercle vertueux du calcin...
L'utilisation de calcin permet à la fois de recycler une grande partie du verre issu du recyclage mais aussi de réduire les émissions de CO2 par l'abaissement des températures de fusion. Mais, effet pervers, ce calcin contient une teneur élevée en Plomb et autres métaux lourds, conséquence du recyclage et de la difficulté du tri.
Sur Cognac, il existe 2 fournisseurs de verres recyclés pour Saint-Gobain :
- SRVT est situé sur la commune de Merpins et a régulièrement les honneurs de la presse pour les nuisances aux riverains : bruits et poussières de verre notamment.
- SAVIM, filiale de Saint-Gobain, situé à Châteaubernard (à coté de la déchetterie).
Ainsi St-Gobain, de part son usage de calcin, est le principal émetteur de plomb dans l'atmosphère de la région Poitou-Charentes avec environ 3 tonnes par an. Les études menées par la Drire sur la pollution des sols n'a mis en évidence aucune "pollution significative".
L'ATMO possède une station de mesure de la qualité de l'air place Camille Godard depuis 1998 qui mesure en continu certains polluants, cette station a été installée pour surveiller notamment St-Gobain. En 2000 et 2004 une campagne de mesures plus poussées de l'ATMO a contrôlé pendant plusieurs mois la qualité de l'air autour de l'usine (voir les détails dans le billet du 25 octobre 2005), il y ait conclu que "l'impact industriel de Saint-Gobain est non négligeable sans toutefois entrainer de dépassement des valeurs réglementaires. De plus l'étude granulométrique a montré que le plomb est retrouvé majoritairement sur les particules très fines PM2.5". Ces particules très fines ne sont pas mesurées.
D'année en année et malgré des efforts, les émissions de polluants de l'usine ne s'améliorent guère. En partie à cause de l'augmentation du taux de calcin utilisé et aussi de la productivité accrue. Pour plus de détails, voir le billet du 15 mars 2007 qui revient sur l'historique de la mesure de pollution et de St-Gobain.
Pour l'année 2006, la Drire n'a pas encore publié les résultats complets mais on constate déjà que le CO2 augmente légèrement pour atteindre 123 599 tonnes (3,9 kg par seconde) dépassant ainsi très légèrement le quota d'émission alloué.
Les rejets de plomb restent "stables" avec 3 tonnes et par contre une sérieuse hausse de l'arsenic : 561 Kg contre 283 Kg l'an passé ainsi que pour la Chrome et le Cobalt. Le pompage d'eau dans la nappe phréatique augmente aussi avec 273 000 m3 pour une consommation sur la réseau d'eau potable de 80 600 m3.
Filtrage des fumées
Toutefois, les choses devraient rapidement s'améliorer, St-Gobain a annoncé en 2007 l'installation d'un système électrofiltre qui arrive dans sa phase finale. Prévu initialement pour être mis en service fin 2007, l'électrofiltre débute tout juste son fonctionnement sur 2 des 3 fours.
Saint-Gobain a rencontré des difficultés techniques de mise en œuvre qui semblent en partie résolues, le dernier four devrait être branché à la rentrée.
Un arrêté ministériel du 12 mars 2003 fixe les concentrations de plomb à 1 mg/Nm3 si le rejet est supérieur à 5 grammes par heure. En 2006, avec 3 tonnes, St-Gobain a émis 345 grammes / heure ce qui les met dans l'obligation de limiter la concentration de plomb à 1 mg/Nm3 et à mesurer quotidiennement la concentration de plomb.
Là ça devient compliqué car le Nm3 est une unité de mesure de volume normalisé correspond à 1 m3 de gaz sec, à la pression de 101,3 kiloPascal et à la température de 0°C... Autant dire que je ne sais pas du tout comment calculer, à partir de données de la Drire exprimé en kg/an, si le rejet est conforme ou pas.
Le système de dépoussiérage par électrofiltre est une technique déjà ancienne mais éprouvée, qui permet de filtrer les fines poussières et ce sont sur ces très petites poussières PM10 (inférieure à 10 µm) et PM2.5 (moins de 2,5µm) que les métaux lourds se fixe (plomb, cadmium, arsenic, etc...). Ce sont aussi ces poussières qui sont dans le collimateur des autorités européennes qui fixent des seuils admissibles de plus en plus réduits.
La station ATMO de Cognac, mesure notamment le taux de poussière PM10. Ce taux qui a dépassé (place Camille Godard) le seuil d'information aux personnes sensibles (80µg/m3) le 15 mars 2007 avec 88 µg/m3. Depuis le début d'année ce taux a atteint des valeurs proches le 15 février avec 74 µg et 3 jours fin janvier avec 66, 68 et 61 µg. En 2005, la station a mesuré 4 dépassements du seuil d'information.
Toutes ces données sont disponibles, en temps réel, sur le site de l'ATMO
L'électrofiltre est en cours d'installation depuis fin 2007 devant les cheminées des 3 fours. Les fumées des fours 2 et 3 sont dirigés vers celui-ci, qui assure le filtrage par captage des poussières avec des électro-aimants et libère le reste dans l'atmosphère. De tels systèmes permettent de diminuer significativement les poussières (divisé par 10) ainsi que les oxydes de soufres (SO2) par 2.
Une telle installation a un coût d'environ 5 millions d'euros plus un coût d'exploitation annuel de 100 000 euros selon le responsable de St-Gobain.
Le système est gros consommateur d'électricité.
L'ensemble n'est pas magique et la poussière reste stockée dans des silos qu'il convient de vidanger régulièrement et de l'acheminer vers des décharges spécialisées.
La verrerie de Saint-Gobain émet 3 tonnes de plomb par an, soit 8,3 kilos par jour ou 345 grammes par heure avec ces 3 fours.
Aujourd'hui 2 fours sont branchés sur l'électrofiltre, encore en expérimentation. Bientôt la mise en service définitive devrait intervenir avec le raccordement du four n°1 (le plus polluant) et ainsi réduire significativement les émissions de polluants à Cognac.
En savoir plus :
- Dossier St-Gobain Cognac (collectif Le Retour de l'Autruche)
- Monographie sur l'industrie du verre (Ministère de l'écologie)
- Dossier très complet sur le recyclage du verre (Cercle Nationale du Recyclage)
- Emissions polluantes déclarées par St-Gobain Cognac (registre iREP)
- Visite St-Gobain (Panoglobe, photos 360°)
2 commentaires:
Attention pad ! Le four 1 n'est pas réellement relié à l'électrofiltre ! Les machines de ce four sont en chantier et c'est pourquoi il n'y a pas de fumée actuellement. Mais d'ici 2 semaines, le four devrait reprendre son activité et les fumées devraient être à 100% filtrées... Patience donc...
C'est ce que j'ai vu dans la presse locale hier, le four n°1 était en réparation...
Je pars à la pêche aux infos, car il devait être branché sous peu.
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