dimanche 23 décembre 2007

Une année sous le signe des OGM en Charente

Cette année la Charente reçoit pour la première fois l'honneur de l'expérimentation de la culture d'OGM avec 280 ha de plantations de maïs génétiquement modifié Monsanto 810™.

L'expérimentation en plein champ en France existe depuis quelques années, mais c'est la première fois que notre département est élu. Cette année c'est donc 35 parcelles représentant 280 hectares (460 ha au total en Poitou-Charentes) qui sont officiellement cultivés. Officiellement car il s'agit là des parcelles enregistrées et si la déclaration est obligatoire elle n'est pas contrôlée. Au total ce sont donc 22 650 hectares "expérimentaux" qui sont cultivés en France cette année. Green Peace France a lancé la construction d'une carte des parcelles OGM, mais a du retirer celle-ci de leur site Français après une action en justice de l'état à leur encontre.

Le ministère de l'agriculture a mis en place cette année un nouveau fonctionnement afin de se prémunir des acteurs anti-OGM. Désormais les sites cultivés ne sont pas connus précisément, seule une liste indiquant les cantons est proposée par les services de l'état depuis le mois de juillet.



A partir des données du ministère j'ai donc reconstruit une carte des cantons où l'on trouve des cultures OGM expérimentales (voir ci-contre).
Cognac est bien entouré mais c'est surtout le sud-charente qui est touché. Et c'est dans le sud-charente que se trouve le producteur bio chez qui je m'approvisionne en légumes de qualité. Lui aussi est très inquiet, son voisin est un pro-OGM et suite à une manifestation à laquelle il avait participé, on a deversé du lisier sous les fenêtres de son habitation... Mais c'est surtout pour son label "Bio" qu'il est inquiet, la dissémination OGM pourrait ruiner son projet.

Le MON-810 (commercialisé sous la marque YieldGard™) est le seul OGM autorisé à la culture en plein champ en France (depuis 1998), sa caractéristique "modifiée" est de produire une toxine, sorte d'insecticide, contre la pyrale notamment. En avril dernier, cet OGM a occupé le devant de la scène européenne lorsque l'Allemagne a suspendu sa commercialisation. Des études (dont une médiatisée de Greenpeace) semblent indiquer que cette semence transgénique produit sa toxine de manière très aléatoire, certaines plantes en sont dépourvues et d'autres en contiennent beaucoup trop. Cette variabilité laisse planer le doute sur l'innocuité du maïs et sur son efficacité envers les insectes ciblés. Les règles dans le domaine préconisent que le dosage de toxine doit être 25 fois supérieur a celui qui détruit 99% des insectes, à moindre dose la toxine risque de créer des insectes résistants au lieu de les détruire. Avant l'Allemagne, c'était l'Autriche, la Grèce, l'Italie, la Suisse, la Hongrie et la Pologne qui ont interdit le maïs Monsanto 810™ en utilisant une directive européenne autorisant les états à suspendre la commercialisation d'un OGM si des études produites après l'autorisation indiquent une possibilité de risque pour la santé ou l'environnement.

La France n'a pas suivi, puisque le ministère de l'agriculture a donné une fin de non recevoir à toutes les réclamations sur le sujet, y compris au ministre de l'environnement. Lors du très médiatique Grenelle de l'Environnement, Jean-Louis Borlo a annoncé une suspension de la commercialisation jusqu'en janvier 2008, juste avant la période de semence. Il a d'ailleurs reconnu lui-même dans Le Point que "On garde le gel sur le 810 jusqu'au vote de la loi (...) De toutes façons, la loi va être votée avant les prochains semis, donc la question de se pose pas".
Question difficile, lors de ce même Grenelle les agriculteurs ont quitté la table des négociations lorsque le ministre avait annoncé "(...) qu'une tendance générale se dégageait pour aller vers un moratoire".

La culture OGM est désapprouvée par une majorité de Français, mais soutenue par une grande partie de la filière agricole qui espère là des rendements toujours meilleurs. Le lobby industriel (Monsanto en tête) fait aussi pression de tout cotés et notamment vers nos politiques avec l'argument que la France ne doit pas prendre de retard dans ce domaine, sous peine de se voir distancée économiquement... La santé, l'environnement, le principe de précaution il n'en est pas question. Les récentes erreurs sanitaires (amiante, sang contaminé, vache folle...) n'ont pas servi de leçon semble-t-il.
De l'autre coté se pose le problème de la "cohabitation" OGM et label Bio, totalement incompatible pour ces derniers. Les agriculteurs aussi qui en s'unissant aux grands semanciers mettent les pieds dans un changement radical de leur métier en se transformant en sous-traitant industriels.

En mai dernier j'avais ici même fait état de la réponse de notre député d'alors (Jacques Bobe) à mes interrogations sur les OGM : les risques sanitaires et environnementaux sont évacués car on peu avoir confiance dans nos industriels... J'espère bien, mais ça me rassure pas du tout.

D'autant que même pour les expérimentations officielles il y a des cas de non conformités et d'infractions aux règles de prévention de la dissémination, le dernier bilan proposé par le ministère de l'agriculture fait état de 5 non-conformités (non-respect de la barrière pollinique) et 1 infraction sur 119 essais, soit 5% de non-respect des règles.

Depuis de l'eau a coulé sous les ponts et Jacques Bobe n'est plus député, mais nous avons 280 hectares d'OGM sur notre territoire.
Ce projet de loi reste d'actualité puisqu'il sera proposé en janvier à nos députés. Ce projet de loi est en contradiction avec les engagements pris au (déjà tristement célèbre) Grenelle de l'environnement.

Le collectif Vigilance OGM de Charente est très actif sur le terrain en organisant régulièrement des rendez-vous avec la presse et les militants pour dénoncer des parcelles OGM sur le territoire (Chadurie, Villefagnan). Leur dernière action du 11 novembre dernier a été de sensibiliser les consommateurs du Carrefour de Soyaux sur la présence du beurre "Paysan Breton" qui utilise des semences OGM dans la nourriture des vaches destinées à produire le lait tout en utilisant la notion de patrimoine et de terroir pour leur campagne marketing.
La région Poitou-Charentes de son coté soutien l'opération d'inventaire à l'échelle de la région afin de pallier au déficit de transparence du gouvernement.

Pour terminer, l'Europe devrait bientôt autoriser la mise sur le marché de la première pomme de terre OGM, qui contiendra des antibiotiques. Les antibiotiques se sera peut être demain AUTOMATIQUE...

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